Profiter du contexte propice à la remise en cause des dogmes budgétaires européens pour trouver un programme européen à toute la gauche. A un an de l’élection présidentielle, l’ambition de la nouvelle publication de la Fondation Jean-Jaurès n’est pas mince. Dans une note fouillée et argumentée, intitulée « La gauche française et l’Europe : une synthèse possible pour 2022 ? », publiée vendredi 23 avril, la fondation tente une synthèse des points d’accord des gauches et souligne la faisabilité d’un consensus autour d’une plate-forme commune. Avec les transformations en cours de l’Union européenne sous la pression des crises sanitaire et économique, les divergences sur l’Europe ne seraient plus un obstacle majeur dans la perspective de la présidentielle.
Les deux auteurs Théo Verdier, expert associé de la fondation et Rémi Lauwerier, consultant indépendant, ont tout d’abord décortiqué les fondamentaux idéologiques de la gauche depuis les prémices de la construction européenne. Ils reviennent sur les grandes césures qui ont divisé d’abord la Section française de l’internationale ouvrière (SFIO) et le Parti communiste. Les héritiers de la première se sont engagés dans l’élaboration d’une communauté européenne, notamment grâce à François Mitterrand qui va forger la doctrine socialiste. Les communistes ont refusé de manière viscérale toute entité supranationale, avant d’opérer un virage, sous le coup de la révolution eurocommuniste puis de la chute de l’Union soviétique, mettant fin à son refus de participer aux instances communautaires.
Les deux auteurs décrivent ensuite les deux traumatismes qui vont durablement creuser le fossé entre les Français et l’Europe et diviser les partis de gauche et écologistes : le référendum sur le traité de Maastricht puis celui de 2005 sur le Traité constitutionnel européen.
Electorats plus aussi irréconciliables
Quelques années plus tard, ce sera à La France insoumise (LFI) de prendre le relais des eurosceptiques avec une critique radicale d’une « Europe libérale ». La question européenne est alors aussi devenue clivante au sein du Parti socialiste (PS) et des Verts. Le renoncement de François Hollande de renégocier ce traité en 2012 va ancrer durablement la méfiance des différents courants de la gauche sur la capacité – et volonté – des socialistes à provoquer des changements dans la conduite de l’Europe.
Depuis 2017 pourtant, les choses ont bougé. D’abord parce que le PS, dans son inventaire des années Hollande, est revenu à une critique plus sévère du fonctionnement des instances européennes. D’autre part, Jean-Luc Mélenchon semble avoir mis de l’eau dans son vin : il paraît avoir abandonné l’idée de son « plan A/plan B » – engager le bras de fer avec les instances de Bruxelles pour une Europe plus sociale et démocratique et, sinon, sortir de l’euro et des traités européens. Son parti semble aujourd’hui défendre une forte résistance aux injonctions bruxelloises mais sans rupture, afin de ne pas s’aliéner les électeurs socialistes et écologistes.
Il vous reste 39.9% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
Comments